COVID-19: AU SUJET DU RÔLE DE L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE.

L’IA de BlueDot inclut plus de 40 ensembles de données spécifiques reflétant la circulation du virus et le potentiel de contamination.

Et si nous parlions du rôle de l’Intelligence Artificielle dans la pandémie du SARS-CoV-2? Le concept fait peur, et pourtant l’IA a pris de l’ampleur dans gestion de la pandémie! Le monde décrit par l’écrivain de science-fiction Isaac Asimov prend forme jour après jour. Loin d’être un conteur de fiction imaginative, il était professeur de biochimie à l’université de Boston; outre ses livres de science-fiction, il s’était attelé à de la vulgarisation scientifique de qualité.

Futurologue avant l’heure, Isaac Asimov avait imaginé en 1964, le monde de 2014 (sept ans avant la pandémie actuelle). Il avait imaginé l’ère des robots aux cerveaux positroniques. Un cerveau positronique (néologisme de l’auteur) est un appareil technologique fictif, Il tient le rôle d’unité centrale pour les robots, et, sans plus de précision, leur fournit une forme de conscience reconnaissable comme telle par les humains. Même le robot Kenshiro, fait de muscles et d’os n’arrive pas à la cheville des robots imaginés par Isaac Asimov ni même ceux qui sont évoqués ci-dessous dans ce post. Mais Il est temps après ces digressions de revenir à l’IA dans la gestion du SARS-Cov-2; elle s’avère salvatrice dans bien des situations.

Revenons au tout début de la pandémie. Dès le 31 décembre 2019, BlueDot, une start-up canadienne avait détecté les premiers signes de l’infection à la Covid-19 bien avant avant l’annonce officielle de l’OMS. On sait maintenant grâce à des témoignages de plus en plus nombreux de médecins sur le terrain que des patients étaient déjà contaminés en décembre. Quel fût le process de Bluedot ?

L’algorithme de détection mis au point par cette startup canadienne incorpore des données collectées sur des forums en ligne, des recherches de symptômes sur Google, des reportages, des bulletins de santé ou des déclarations officielles. Il étudie aussi les conditions climatiques réelles, les déplacements de populations grâce à la vente des billets d’avion, la carte des trajets aériens, la population d’animaux et d’insectes et la capacité du système de santé. L’IA de BlueDot inclut plus de 40 ensembles de données spécifiques reflétant la circulation du virus et le potentiel de contamination. Ces données (anonymes) collectées par BlueDot ne sont pas accessibles au quidam comme vous et moi mais réservées aux institutions de santé publique d’une douzaine de pays, aux compagnies aériennes et aux hôpitaux dans lesquels les personnes contaminées pourraient se rendre. The Lancet, revue prestigieuse de professionnels, est dithyrambique sur BlueDot concernant l’épidémie de Zika. Comme il l’est écrit noir sur blanc sur leur site, la startup canadienne a prédit avec précision avec cet algorithme la propagation mondiale du SARS-CoV-2. Il faut rappeler que la conception d’un tel algorithme est le fruit d’une intelligence collective.

L’une des mesures les plus surprenantes et digne du monde d’Isaac Asimov est celle de l’utilisation de robots limitant les interactions physiques pour diminuer la charge virale et casser la chaîne de contamination! C’est la mission assignée à Spot, le chien robot de Boston Dynamics où à Singapour, il s’est chargé de rappeler les règles de distanciation sociale. Spot est capable d’estimer le nombre de personnes présentes dans un parc. Je reconnais que c’est flippant et liberticide d’avoir un truc en métal venir vous tancer car vous avez dérogé aux règles sanitaires, mais ce n’est pas la seule mission de Spot! Il a aussi été mis à contribition pour livrer des médicaments à des personnes atteintes du SARS-Cov-2 confinées à Changi Exhibition Center.

Un hôpital américain, celui de Birmingham Women, a adapté Spot en plate-forme mobile de télé-médecine pour connecter les soignants par un système de visioconférence, dans le but de protéger le personnel de santé des patients potentiellement contaminants. Équipé d’un IPAD et d’un « talkie walkie », le robot-chien aide ainsi à trier les patients à distance qui attendent devant les centres hospitaliers dévolus au Covid-19. Spot n’est pas le seul robot à aider les équipes soignantes. Toujours aux États-Unis, ICT Journal rapporte qu’un robot a été impliqué pour traiter le premier malade du Covid-19. Le patient avait été placé en observation et surveillé par un robot équipé d’un stéthoscope et d’un écran pour communiquer et était téléguidé par les médecins.

Dans mon post « La robot-thérapie, un avenir prometteur », j’avais évoqué Pepper, le robot social capable d’analyser les sentiments, capable de danser une gigue endiablée ( je force le trait) ou de plaisanter. Dans la gestion de la pandémie actuelle, Pepper est employé à la mission d’aider les proches des personnes hospitalisées pour la Covid-19 à l’hôpital de la Salpêtrière. Depuis avril dernier, quatre robots humanoïdes Pepper de Softbank sont équipés d’un écran et d’une application, de téléprésence pour permettre aux proches de converser avec le patient hospitalisé sans risque d’attraper le virus. Si ces visites robotiques ne remplacent pas la chaleur humaine, c’est mieux que rien! L’homme garde toujours le contrôle de décider de l’emploi du robot. La preuve est que pour d’autres tâches, les qualités de Pepper n’ont pas convaincu le personnel infirmier.

«Dans le cadre d’un service de réanimation, un robot humanoïde n’est pas la forme la plus adaptée pour faire de la télévisite, note Nicolas Boudot. Il y a des contraintes telles que le personnel préfère utiliser des moyens plus simples, comme des télévisions sur pied.» Qu’à cela ne tienne Pepper sera affecté à des tâches d’accueil du public pour lui rappeler les règles sanitaires en cours et éviter aux soignants d’être en contact avec lui.

Dans la gestion de la pandémie, le Rwanda a adopté un prototype de robot humanoïde, qui dans le même esprit que Spot et Pepper permet d’assurer aux médecins un traitement à distance. 5 robots ont ainsi été mis en service à Kigali.Munis d’un bras électronique, il sont programmés à diverses tâches dont celle de servir des repas dans les chambres des personnes contaminées par le SARS-Cov-2 ou transporter des échantillons au laboratoire, soulageant ainsi le personnel hospitalier. Cette technologie va aussi assister les médecins dans la détection des cas suspects dans la communauté. Les autorités sanitaires envisagent la détection des températures corporelles anormales dans la foule. Selon Zora Robotics qui construit ces appareils, chaque robot a la capacité de dépister entre 50 et 150 personnes par minute. Quel assistant efficace au service de l’homme!

L’autre avantage qu’offre cette technologie, fait remarquer Tommy Deblieck, co-PDG de cette société, est que ces robots peuvent, en plus de prendre la température, détecter si une personne porte un masque facial ou non. Mais ainsi que le souligne « un médecin épidémiologiste Jean Damascène Rurangwa, à SciDev.Net, au regard de la situation actuelle de la COVID-19, aucun robot ne peut faire un meilleur travail que les médecins.» Et faut-il que les soignants soient formés à son maniement! .

D’autres pays se sont mis dans l’air du temps des robots soignants! Comme l’Italie, la Tunisie! Au Sénégal, les élèves ingénieurs de l’école polytechnique de Dakar ont conçu un robot soignant multitâches qu’ils ont baptisé « Docteur Car » capable de parler plusieurs langues comme le wolof, le pulaar, le français et l’anglais! Un bel exemple d’intelligence collective et des jeunes gens à l’avenir prometteur! Au Danemark, les chercheurs ont mis au point un robot capable d’effectuer des prélèvements de gorge, toujours dans l’esprit d’éviter que les équipes soignantes soient touchées par le SARS-Cov-2.

L’ère des robots infirmiers, épidémie virale ou non, ne fait que commencer, et bouleverse la conception du soin médical, et également de la relation avec les patients. Il en sera de même avec le développement à grande échelle de la téléconsultation. Évidemment, on s’inquiéter de la technologisation du soin qui place une machine entre le médecin et le patient, risquant en cela une certaine déshumanisation du soin. Il faudra alors inventer une nouvelle approche du soin qui complètera ou prendra le relais. Pourquoi pas une nouvelle fonction du psychologue qui assiste les équipes médicales?

Il y a une autre utilisation des robots plus contestée, qui est celle de la désinfection de l’air ou des surfaces contaminées par la Covid-19. Ainsi le Robot chinois Thor-1 a été présenté comme une arme fatale anti-virus dans un parc technologique à Hangzhou. L’entreprise Boston Dynamics compte mettre au point des lampes UV pour désinfecter les lieux publics et les établissements médicaux. Tout « en notant tout de même qu’aujourd’hui aucune étude scientifique n’a démontré l’efficacité des UV dans la destruction des germes du SARS-CoV-2.»

Ors, Anne-Claude Crémieux, spécialiste des maladies infectieuses à l’hôpital Saint-Louis, ne semble pas enchantée par ces prototypes de robot nettoyeur. Lors d’une interview, elle déclare que « Désinfecter l’air extérieur ne sert à rienCe n’est pas en respirant l’air d’une ville, où il y a de nombreux cas de personnes contaminées qu’on s’infecte, c’est au contact étroit de personnes malades. La seule façon de lutter contre une épidémie, c’est de rompre la chaîne de contamination entre humains, en isolant les malades.» Même son, de cloche de la part de Bruno Hoen, directeur de la recherche médicale à l’Institut Pasteur. « Le virus n’est pas vivant dans l’environnement, mais dans l’organisme des sujets malades. »

Il est manifeste que les robots déployés lors de la crise sanitaire évitent les contaminations au SARS-Cov-2 en chaine des soignants en première ligne et sont des assistants infatigables! On peut être dérangé par un aspect de la relation médecin/malade qui peut paraitre déshumanisant, mais dans certaines situations, il faut aussi évaluer le risque/bénéfice et dans le cas de la gestion de la Covid-19, c’est tout bénéfice pour les soignants. Pour les générations à venir, les robots soignants feront partie intégrante de la médecine .

J’avais cité en introduction de ce post avec Isaac Asimov, et je vais le conclure avec l’une de ses citations empruntée au Cycle des robots, les cavernes d’acier, écrit entre 1950 et 1980! Terriblement contemporain mais nul doute qu’Isaac a fait plus que nourrir l’imagination de ses lecteurs, il leur a donné le goût de la science!

Mais pourquoi donner aux robot une forme humaine ?
– Parce que la forme humaine est, dans toute la nature, celle qui donne le meilleur rendement. Nous ne sommes pas des animaux spécialisés, monsieur Baley, sauf au point de vue de notre système nerveux, et dans quelques autres domaines. Si vous désirez construire un être mécanique, capable d’accomplir un très grand nombre de mouvements, des gestes et d’actes, sans se tromper, vous ne pouvez faire mieux qu’imiter la forme humaine.

Vidéo sur les robots en Italie.

Auteur : Nicole Bétrencourt

Psychologue clinicienne, psychosociologue

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