Il s’agit d’une expérience à faire en famille ou entre amis à l’aide d’un jeu de rôles s’appuyant sur une métaphore digne d’une fable de Jean de La fontaine.
On entend souvent parler d’intelligence collective pour évoquer les comportements de groupe! Que désigne-t-elle? Elle sert à désigner l’émergence des nouveaux modes de communication, l’accès au savoir et les relations entre individus dans le cyberspace. Pierre Levy pense qu’il faut développer une véritable anthropologie dédiée au milieu virtuel. « Les nouveaux moyens de communication permettent aux groupes humains de mettre en commun leurs imaginations et leurs savoirs»; l’intelligence collective en est le vecteur.
Joseph Henrich, professeur de biologie évolutive humaine, également dans une perspective anthropologique développe dans son livre « L’Intelligence collective, comment expliquer la réussite de l’espèce humaine », la manière dont l’intelligence collective influence notre développement génétique à travers la culture. L’intelligence collective, c’est la culture. Sans elle, l’accès à cette source de savoir accumulée au fil du temps et au fil des générations, nous serions incapables de survivre. Dans son livre, écrit-il: « Ce sont nos cerveaux collectifs à l’oeuvre sur des générations, et non la puissance d’inventions innées ou les facultés créatrices, qui expliquent les technologies sophistiquées de notre espèce et son incroyable succès écologique.» Cela n’exclut pas l’innovation par les cerveaux les plus doués, mais la mise en pratique passe par le groupe qui a mis en commun ses compétences complémentaires. Cela inclut également une interconnexion entre membres ayant chacun un savoir faire. Je vais étayer mes propos en revenant à l’Intelligence Artificielle (IA) et à ses applications dans le domaine médical. Un exemple parmi d’autres. Ainsi « Une approche basée sur le machine-learning (une technologie d’IA explicitement liée au Big Data) assiste les médecins pour diagnostiquer les tumeurs cérébrales. Derrière tous ces programmes qui semblent ne faire qu’un, il y a d’abord l’intelligence humaine (en général). Celle des ingénieurs, des informaticiens et des médecins. C’est un ensemble de compétences scientifiques qui les ont créés. Illustration d’intelligence collective au sens cité précédemment.
Que l’on ne s’y méprenne pas, parler d’intelligence collective ne signifie pas le collectivisme qui renie l’individualité et rogne la liberté par la coercition. La liberté et les respect de l’individualité, celle de la psyché ( le domaine de la psychologie) sont des conditions sine qua none pour que s’exerce l’intelligence collective. Ni la solidarité, mot usité aujourd’hui encore à tort et à travers. L’intelligence collective passe d’abord par le respect de l’intégrité de l’individu humain, le respect de son autonomie au niveau des activités sociales et des ses relations interpersonnelles.
Comment l’intelligence collective pourrait-elle nous aider dans la pandémie actuelle? Le docteur en psychologie cognitive Émile Servan-Schreiber l’évoque dans un récent article du Point. J’ai relevé un passage lumineux où l’intelligence collective pourrait s’avérer judicieuse lors du déconfinement, et Émile Servan-Schreiber propose une une expérience à faire en famille, entre amis ou au bureau! C’est un jeu de rôles s’appuyant sur une métaphore digne d’une fable de Jean de La Fontaine. Elle aurait pu s’intituler le Loup, le berger et ses moutons.
« Chacun reçoit les instructions suivantes : « Vous êtes un berger. Choisissez secrètement autour de vous une personne qui sera votre loup et une autre qui sera votre mouton. Au signal, déplacez-vous afin d’être toujours interposé entre votre loup et votre mouton. » Si chacun s’occupe ainsi de protéger autrui, le groupe deviendra de plus en plus dense jusqu’à faire bloc. Métaphoriquement, c’est la cohésion sociale parfaite. Mais d’autres instructions produisent l’effet inverse : « Vous êtes un mouton. Choisissez secrètement autour de vous une personne qui sera votre loup et une autre qui sera votre berger. Au signal, déplacez-vous afin que votre berger soit toujours interposé entre le loup et vous. » Quand chacun ne cherche ainsi qu’à se protéger, le groupe se disperse en un mouvement chaotique infini. À nous de choisir entre l’intelligence collective d’une société de bergers ou l’aliénation d’un peuple de moutons. »
Alors comment vous définissez vous chers lecteurs? Berger ou mouton? Le loup symbolise le virus, vous vous en doutiez, le berger représente celui qui respecte les gestes barrières, la distance sociale pour préserver les plus vulnérables; celui qui prend soin des autres! Et le mouton…à vous de vous définir…
Un chouette exercice à faire qui aiguise notre sens de la responsabilité envers les autres concernant la contagion virale de la Covid-19. Mieux que la litanie des interdictions diverses délétères pour la psyché qui à force d’être martelées vous enfonce dans la résignation acquise et vous met au trente sixième dessous en annihilant tout espoir ! L’esprit de la métaphore du berger et du mouton est celle du courant humaniste dont le précurseur fut Abraham Maslow, ainsi que du courant positiviste. C’est un exercice ludique de thérapie cognitivo – comportementale.
Alors, osez faire expérience et n’hésitez pas à me faire part de vos commentaires.
« Cette danse des macchabées se déroulait dans les églises le samedi saint, à l’époque où curieusement se célébrait le nouvel an romain. Le peuple étant très religieux, le squelette de la danse macabre ne prêchait pas le néant.»
Le SARS-COV-2, ce diabolique virus est omniprésent dans le monde médical, la recherche, les réseaux sociaux et les médias. Comme l’a écrit le journaliste médico-scientifique Marc Gozlan dans son billet de blog, « Il était une fois les coronavirus »« Depuis le début de l’année, le nombre de publications scientifiques relatives au coronavirus SARS-COV-2 explose. On recense dans la base de données biomédicales PubMed près de 1 800 articles comportant dans leur titre le terme coronavirus, Covid-19 ou SARS-CoV-2.»
La pandémie de cette année n’est pas la seule épidémie virale de l’histoire. Le siècle dernier et le début du troisième millénaire ont connu des pandémies meurtrières comme celle de la « grippe espagnole », due à une souche H1 N1 aurait fait entre 20 et 50 millions de morts. En 2002, le SRAS-Cov, en 2019, nouvelle épidémie de rougeole, entre 2014 et 2016, la fièvre Ebola, de 2008 à 20015, le virus dengue, depuis 2015, le virus Zika, et l’une des plus connues car elle fut politisée dans notre pays avec une préconisation de vaccination, la grippe A (H1N1). Et sans oublier aussi le VIH, depuis 1981 qui a fait 32 millions de morts.
Trois millions de personnes sont infectées par le virus dans le monde. 206.811 sont à ce jour décédées, dont 22.856 en France...le taux de létalité du virus est évalué entre 2 % et 3 %. Par ailleurs, il est rapporté par les professionnels sanitaires que la majorité des victimes du coronavirus COVID-19 étaient âgées (les personnes de plus de 80 ans sont les plus à risque) ou atteintes de pathologies antérieures.
Les caractères inédits du Covid-19 est qu’aucun pays pays n’est épargné, et ce qui l’est encore plus est la mesure prise par des gouvernements de confiner les habitants chez eux entrainant un arrêt quasi-mondial de l’économie. Rester chez soi, ne pas aller au bureau, ne pas aller au spectacle, bref circuler à sa guise, un besoin élémentaire qui figurerait sur la première marche de la pyramide de Maslow s’il l’avait su en son temps, et nous l’avions oublié! La libre circulation aussi indispensable que l’air que nous respirons! Il n’y a pour l’instant aucun traitement ni vaccin pour contrer le virus, et seuls la limitation des contacts sociaux, l’arrêt des transports, des regroupements sont les seuls moyens efficaces avec des mesures hygiéniques, la distanciation sociale pour contenir l’épidémie. That’s life! Il y a aussi un sentiment d’impuissance et d’incompréhension qui nous envahit! Les progrès de la science et de la médecine ont permis un sacré allongement de la durée de vie en pleine forme, l’éradication de certaines maladies avec les médicaments et la vaccination. Symboliquement et inconsciemment nous leur attribuions une fonction presque thaumaturge! La réalité nous rattrape durement! Et bien non, aucune martingale pharmaceutique n’est efficace à ce jour pour empêcher le Covid-19 de prospérer, d’être mortel et de laisser des séquelles invalidantes!
Le Covid-19 évoque le rapport que nous avons avec la mort en Occident. Evidemment, nous savons que nous ne sommes pas immortels comme le héros du film Highlander qui traverse les siècles éternellement jeune tandis que ses proches vieillissent et meurent. Ou bien encore comme l’alchimiste le Comte de Saint-Germain réputé lui aussi « immortel »! Cette épidémie virale nous confronte directement avec les allégories de la Grande Faucheuse et des quatre cavaliers de l’Apocalypse évoqués lors des fléaux de la guerre de cent ans voire l’Argameddon. En psychologie en tout être humain, à tous les niveaux de son existence, coexistent la mort et la vie. L’Éros et le Thanatos. En psychologie, la mort est en psychothérapie souvent symbolique, pour accéder à un état psychologique à un niveau supérieur. En dehors des soins palliatifs, il ne s’agit pas de la mort physique, il s’agit de nos états d’âme! Tout notre environnement extérieur, notre mode de vie que certains appellent consumériste et superficiel nous éloignent de cette fin inéluctable, de la putréfaction des chairs, même si autour de nous, nos proches disparaissent et que nous savons nous aussi, nous les suivrons. Les décès par Covid-19 nous semblent profondément injuste car dans l’inconscient collectif, c’est une mort avant terme! Ô combien ce sont des séniors de plus de 80 ans les plus durement frappés!
Lors d’une une interview, le philosophe André Comte-Sponville, a répondu à une question sur le rapport que nous entretenons aujourd’hui avec la mort, s’il a changé avec le SARS-COVID2, si mourir était devenu inacceptable aujourd’hui « Elle l’a toujours été, répond le philosophe mais comme on y pense de moins en moins, on s’en effraie de plus en plus, lorsqu’elle s’approche. Tout se passe comme si les médias découvraient que nous sommes mortels! Vous parlez d’un scoop! »…« Mais ce n’est pas une raison pour ne parler plus que de ça, comme font nos télévisions depuis un mois, ni pour avoir en permanence « la peur au ventre », comme je l’ai tant entendu répéter ces derniers jours. Un journaliste m’a demandé – je vous jure que c’est vrai – si c’était la fin du monde! Vous vous rendez compte? Nous sommes confrontés à une maladie dont le taux de létalité est de 1 ou 2% (sans doute moins, si on tient compte des cas non diagnostiqués), et les gens vous parlent de fin du monde.»
Mais psychologiquement, comment s’accommodait-on les siècles passées, au temps des grandes épidémies infectieuses où la mort était plus omniprésente dans la vie quotidienne? Le Moyen Age a vu défiler des fléaux mortels comme la peste, le scorbut, le typhus, les dysenteries. Et la mortalité infantile, parlons en! Un nouveau-né sur quatre mourrait dans sa première année, et c’est tout juste si un enfant sur quatre aussi soufflait ses deux bougies, sans oublier les femmes qui mouraient souvent en couches. Certains avancent l’idée d’un déni de la mort actuellement, je penche plutôt que nous avons repoussé mentalement dans le temps, l’échéance fatale due l’allongement de la durée de vie. Et avons sans doute perdu nos racines symboliques et spirituelles; la spiritualité est à voir au sens large et indépendante des religions.
La mort était plus apprivoisée qu’aujourd’hui que les siècles passés? Manifestement, au Moyen Age, elle n’était pas occultée comme aujourd’hui. Comme en témoigne les représentations de la « Danse Macabre « dans les églises au XV siècle. Ce genre de peintures fut très en vogue au XIV et XV ème siècle, celui des grandes épidémies et des grands fléaux qui décimaient des populations entières.
Où se trouvent ces vestiges de la Danse Macabre? L’un d’eux dans l’église de la Chaise-Dieu (Haute-Loire). Vingt-trois personnages, de toutes les catégories sociales y sont représentées dans une posture particulière. Tous, du plus puissant au plus faible, sont logés à la même enseigne. Ils sont en chemin tirés par la mort en tenue de squelette. Chaque personne symbolise un état d’esprit et un statut social. Ainsi deux militaires, en sens contraire de la marche, alors que leur mission première est de mourir pour leur pays. Le juriste est malmené par la Mort qui lui enfonce son chapeaux sur les yeux, lui signifiant ainsi qu’il n’a rien su de la vérité de son vivant.
Hyppolite Fourtout affirme que macabre viendrait de saint Macaire. D’autres pensent que ce mot dérive du poète Macaber. L’archéologue Grasset d’Orcet a une autre interprétation sur ces origines. Elle serait une référence au dieu étrusque de la mort, armé d’un marteau qui en latin se nommait marca, ou marcula.
Cette danse des macchabées se déroulait dans les églises le samedi saint, à l’époque où curieusement se célébrait le nouvel an romain. Le peuple étant très religieux, le squelette de la danse macabre ne prêchait pas le néant. Grasset d’Orcet rajoute son grain de sel local. Dans le Cantal , les Ioniens se nommaient Jas, un peuple de cavaliers. Leur centre politique et religieux était le Mont du Cavalier (Mons Celticus). Étant cavaliers, ils étaient naturellement faucheurs d’où l’origine de l’emblème de la faux ou falco. C’était l’arme du squelette de la danse macabre. Leur déesse était Chloris, déesse des herbages , fille de Teutatès et épouse de Nélée, l’Impitoyable ou la Mort.
Une autre fresque de la « Danse Macabre » se trouve dans la chapelle Kermaria-An-Iskuit (Plouha, Côtes d’Amor); l’iconographie est légèrement différente de celle de la Chaise-Dieu. « Les figures, qui se tiennent par la main, représentent des personnages vivants, de tous âges et de toutes conditions sociales, séparés par des cadavres décharnés qui rythment la farandole. La danse commence au sud (côté chapelle seigneuriale) et se termine sur la face nord. Elle se compose d’une trentaine de personnages de 1,30 mètres de haut, qui apparaissent selon un ordre social décroissant.
L’acteur, l’auteur chargé de rédiger les sentences inscrites sous chaque personnage, mène traditionnellement la sarabande, mais son image a disparu ainsi que celles du pape et de l’empereur. Sont visibles le cardinal, le roi, le patriarche, le connétable, l’archevêque, le chevalier et l’évêque (écuyer, l’abbé, le bailli et l’astrologue, qu’on aurait dû trouver de chaque côté du vitrail, ont également disparu). La danse reprend avec le bourgeois, le chartreux, le sergent. Viennent ensuite quatre personnages qui ne sont pas séparés par des squelettes : le médecin avec sa fiole de médicament et la femme qui s’accroche au bras de ses deux voisins, le mendiant et l’usurier. L’alternance reprend avec l’amoureux en pourpoint, le ménestrel avec son biniou, le laboureur avec sa serpe et son hoyau, et enfin le cordelier (l’image de l’enfant ayant également disparu).»
La danse macabre évoque le rapport ambigu que les hommes entretiennent avec la mort et est lié aux croyances.
Pour égayer ce post mélancolique, et en guise de conclusion, une citation d’Alex Bocat pour mettre du baume au coeur : « Je vous rappelle que la mort ne prend pas de rendez-vous, alors donnez rendez-vous à votre vie.»