
Un article captivant de la BBC a récemment retenu toute mon attention. Le mois de janvier avec ses jours peu ensoleillés et son froid mordant exerce une influence significative sur le comportement, les décisions et l’humeur de certaines personnes. Après la magie festive de Noël, ses festins et rencontres chaleureuses, le mois de janvier pour certains d’entre nous peut paraître terne, c’est indiscutable.
L’article de la BBC fait référence à une publication dans APS Psychologie en juillet 2023, soulignant un constat fascinant: de nombreuses espèces animales présentent des changements saisonniers dans leur physiologie et leur comportement. L’hibernation de l’ours et de la marmotte en est un exemple notable. Malgré des preuves, aussi empiriques soient-elles, les variations saisonnières chez les humains, ne sont pas pleinement pris en compte en psychologie contrairement à d’autres variables telle que la culture, la personnalité et le développement. Les auteurs de l’étude estiment que cela est regrettable, car, selon eux pour eux les variations saisonnières ont des implications sur la psyché humaine. Homo Temporus!
Les saisons exercent un impact sur la psyché, et c’est bien connu à l’instar du Trouble Affectif Saisonnier (TAS). Ce trouble est caractérisé par une dépression récurrente pendant les mois d’hiver, est il est largement documenté en psychiatrie. Cependant, au-delà du TAS, de nombreux autres phénomènes psychologiques, tels que la prise de décision dans divers domaines comportementaux (agressivité, comportement prosocial, comportement alimentaire, libido) suivent également ce cycle. Les goûts musicaux et les couleurs ainsi que les processus attentionnels sont également susceptibles d’être influencés. Les auteurs de l’étude suggèrent même l’émergence d’une nouvelle branche de la psychologie: la psychologie saisonnière. Une proposition légitime puisque le trouble affectif saisonnier est déjà étudié, alors pourquoi ne pas envisager des études similaires à celles menées en éthologie animale?
Se basant sur des exemples animaliers, les auteurs évoquent le changement de pelage du renard dans l’Arctique, les migrations des oies du Canada et même le comportement des enfants anticipant l’arrivée du Père Noël. Ils démontrent ainsi que le comportement humain suit les cycles saisonniers.
Les saisons ne se limitent pas à des phénomènes météorologiques, elles sont également liées à des changements influençant le comportement humain et l’environnement. Chaque saison est associée à des traditions culturelles et à des phénomènes sociaux à grande échelle. Ces changements saisonniers impactent les variables écologiques, la propagation des maladies, les habitudes alimentaires et les comportements avec des répercussions distincts sur la psyché humaine.
À titre d’exemple de tradition culturelle, citons la fête de Sainte Lucie de Syracuse, célébrée le 13 décembre, une date significative en Suède et célébrant la lumière. Au cours d’une procession, une jeune fille a la tête ceinte d’une couronne de cinq bougies. Elle est suivie par sept adolescentes tenant chacune une bougie à la main et vêtues d’une robe blanche avec une ceinture rouge. Cette célébration aide à affronter la nuit polaire en illuminant l’hiver. Des processions lumineuses sont également organisées dans les écoles, les bureaux, les hôtels et les centres commerciaux pour contrer l’obscurité.
Cette ancienne coutume suédoise révèle le besoin des Suédois de trouver des moyens de faire face au froid polaire et l’obscurité en utilisant la festivité et l’humour comme le souligne Jonas Engman, ethnologue au Musée Nordique, citant des croyances des anciens.
Au-delà du TAS, les effets saisonniers sont visibles. Une analyse de 500 millions de tweets écrits par 2,4 millions de personnes datant de 1980 a montré une corrélation entre et une tonalité moins positif dans les tweets. Une autre analyse de 800 millions de tweets au Royaume-Uni a relevé un pic de tristesse en hiver. De plus, environ 50 % des personnes, sans être dépressives, rapportent ressentir des symptômes dépressifs en hiver. Une enquête aux États-Unis sur le bonheur subjectif a même révélé que le bonheur était plus élevé au printemps.
Après l’hiver, lorsque l’été s’installe avec sa chaleur, les comportements agressifs peuvent augmenter. Par exemple, on observe une hausse des crimes violents durant les jours les plus chauds de l’année par rapport aux jours plus frais.
Il est indéniable que les changements de saison exercent une influence sur différents aspects de notre vie allant de notre alimentation à notre activité physique, et même nos capacités cognitives. La chaleur estivale, par exemple, peut provoquer une sensation de satiété plus rapide après le repas. De plus, les saisons peuvent avoir un impact sur la sévérité des symptômes de certaines maladies, comme la maladie d’Alzheimer. Même les individus en bonne santé peuvent ressentir des variations dans leur attention et leurs performances cognitives en fonction des saisons. Une étude belge a révélé que chez des jeunes en bonne santé, les performances sur une tâche de mémoire de travail étaient les plus optimales en automne et minimales au printemps.
Les variation saisonnières s’accompagnent de changements physiologiques, notamment dans la régulation de la sérotonine et son renouvellement, qui sont influencés par la lumière naturelle du soleil. Dans les régions tempérées, les niveaux de sérotonine sont plus élevés dans le cerveau en été et plus bas en hiver. Cette liste des impacts saisonniers est loin d’être exhaustive.
Nos mentalités jouent également un rôle crucial dans l’influence des saisons dans l’Homo Temporus. Un exemple concret se déroule en ce moment même en plein hiver. La psychologue de la santé Kari Leibowitz et sa collègue Joar Vitersø ont mené des enquêtes auprès des Suédois pour comprendre leurs attitudes envers cette saison. Ils ont demandé aux participants d’évaluer positivement ou négativement des déclarations telles que « j’apprécie le confort des mois d’hiver » ou bien encore « j’aime la lumière douce des mois d’hiver ». Les individus qui ont exprimé une appréciation positive pour ces affirmations semblaient moins enclins à ressentir de la tristesse et adoptaient plutôt un regard optimiste sur la vie.
Il est incontestable que notre acuité mentale connait une diminution proportionnelle à avec la durée du jour. Une analyse menée par le Centre médical universitaire Erasmus de Rotterdam, au Pays Bas, sur les données d’une vaste étude longitudinale impliquant plus de 10000 participants âgés de 45 ans et plus a révélé que, pendant la saison hivernale, les performances cognitives telles que l’apprentissage, la mémoire et la concentration étaient légèrement inférieures à celles observées en été. Cette baisse pourrait être imputable à divers facteurs, notamment le blues hivernal ou à un déficit en vitamine D, synthétisée par la peau lors de l’exposition à la lumière. Les journées les plus courtes en hiver favorisent chez certaines personnes une carence en vitamine D.
De nombreux exemples viennent corroborer le lien entre l’Homo Temporus et le cycle des saisons.
L’auteur de l’article de la BBC, David Robson, conclut en mettant en lumière que de nombreux cycles humains découlent de l’interaction complexe entre la biologie et la culture. Les avancées scientifiques nous permettent de mieux appréhender ces changements dans le comportement humain, ouvrant ainsi la possibilité à chacun d’adopter une approche plus positive
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