La Covid-19 est entré par effraction dans notre vie quotidienne, et certainement pour une grande partie de l’année 2021. Bien sur, la pandémie actuelle n’est pas la seule épidémie virale qu’a vécu l’humanité, mais c’est celle qui agite notre quotidien et vers laquelle se tourne toute nos préoccupations.
Après plusieurs confinements, nombre d’entre nous sont envahis par un sentiment d’impuissance et d’incompréhension. Les progrès de la science et de la médecine ont permis un sacré allongement de la durée de vie en pleine forme grâce à l’éradication de certaines maladies avec les médicaments et la vaccination. Symboliquement et inconsciemment nous leur attribuions une fonction presque thaumaturge! La réalité nous rattrape durement! Même si des progrès au niveau de la prise en charge des patients atteints par le virus, aucune martingale pharmaceutique ne semblait efficace à ce jour pour empêcher la Covid-19 de prospérer, d’être mortel et de laisser des séquelles invalidantes! Mais grâce aux performances de la recherche, des vaccins dont ceux à ARN messager sont mis au point, et c’est un miracle de la science. Une chance immense qu’à court terme, la Covid-19 ne soit plus qu’un mauvais souvenir.
Malheureusement, du moins en France, la pandémie fût l’occasion pour les experts autoproclamés, sans formation ni pré-requis médico-scientifique, bref de culture scientifique de déverser des flots de théories pseudo-scientifiques, de fakenews, manipulant ainsi l’opinion publique entamant une véritable guerre politico-idéologique déconstruisant les mises au point des experts médico- scientifiques.
Comme l’ont écrit les journalistes Assma Maas et Juliette Mansour dans le Monde, «portées par les médias et par les réseaux sociaux, de nouvelles figures scientifiques plus ou moins légitimes ont émergé en tenant un discours à rebours des autorités sanitaires. » Dans un post récent, j’avais fait une recension du livre d’Alexandre Moatti, Alterscience, Postures, dogmes, idéologie où il évoquait les alterscientifiques. Avec la pandémie actuelle, nous n’en manquons pas!Hélas!
Le Dr Guy-André Pelouze, dans un récent article publié dans European Scientist, observe qu’on assiste à un étrange recul de la pensée scientifique: « La pandémie met nos systèmes de pensée à l’épreuve. Tous les angles morts de nos conceptions sont testés. Toutes les petites accommodations avec le relativisme sont balayées. C’est ce qui se passe devant nous, en ce moment, même si nous n’en avons pas toujours conscience. Les conséquences pour l’avenir pourraient être sérieuses dans certains pays.»
Et cela risque de se passer avec la vaccination anticovid! Côté côte de confiance envers la vaccination ARN-Messager, la France se situe au bas de l’échelle d’autres pays. Elle est championne du monde des réfractaires! 4 Français sur 10 souhaitent seulement se faire vacciner. Les femmes seraient plus défiantes au sujet des effets secondaires.
Quel est le profil de ces réfractaires? Les plus défiants auraient entre 25 et 34 ans contre 32% chez les plus de 60 ans. D’après le sociologue Jocelyn Raude, «La décision dépend de la perception du virus. Les jeunes se sentent moins susceptibles de développer des formes graves du Covid-19, et préfèrent prendre le risque d’être contaminés que de développer des effets secondaires.» , et il poursuit « L’idée que la vaccination est dangereuse s’est largement répandue dans l’imaginaire collectif»« Elle est portée par les adeptes de la «médecine douce, ou pratiques médicales alternatives, traditionnellement très critiques vis-à-vis des vaccins».
Ces réticences ne sont-elles pas la conséquence de la culture scientifique lacunaire des Français? Il existe pourtant de bons articles de vulgarisation de qualité. Sur les réseaux sociaux, de nombreux médecins font de la vulgarisation de qualité. On peut toujours être critique sur l’information scientifique délivrée, mais elle est accessible pour qui veut faire un effort cognitif!
Un article pertinent publié dans la revue Encephale donne quelques pistes de réflexion. Le postulat de base est que les épidémies sont génératrices d’incertitudes. Nos croyances (nous en avons tous) sont fragilisées lorsque nous sommes confrontés à des bouleversements profonds de notre environnement collectif. Et ce chamboulement profond a permis la propagation « virale » de théories contraires au principe du non primum nocere, la règle de base de tout soignant. Face au charlatanisme et au pseudo-scientisme, il faut évoquer la difficulté pour le grand public de cerner une controverse scientifique qui peut animer les scientifiques entre eux. Dans une controverse scientifique, c’est la pensée analytique qui domine; chacun avance ses arguments en l’état des connaissances scientifiques. La lecture des publications scientifiques n’est pas toujours consensuelle, et chaque médecin a lui aussi son propre système de croyances en matière de soins, sans pour autant verser dans le charlatanisme!
Cette défiance envers les vaccins est aussi renforcée par des personnalités publiques, voire de certains politiques qui font part de leurs états d’âme sur les plateaux télé ou la radio sur l’efficacité des vaccins voire leur supposée dangerosité due à leurs effets secondaires, et ceci sans argumentations scientifiques étayées.
« Je remets en cause la folie hygiéniste qui, sous prétexte de protéger les personnes âgées arrivées dans la dernière trajectoire de leur vie, impose des situations proprement inhumaines» (Marie de Hennezel)
Et si nous parlions de la santé mentale en temps de Covid-19? En ces temps de confinement passé et présent (allégé parait-il) ? En ces temps de protocoles sanitaires et de distanciation sociale qui bouleversent notre vie et nos rapports sociaux? Réflexe pavlovien, je me surprends à penser à un troisième confinement qui nous tomberait sur le paletot l’année prochaine.
La pandémie du Covid-19 rabat les carte de la « santé mentale » collective et individuelle. Dans un récent article du Figaro, le philosophe Damien Le Gay, président du comité national d’éthique funéraire, évoque une vague de dépression inédite par son ampleur! Le philosophe parle des résultats del’enquête faite par Santé Publique France:« … le taux d’anxiété des Français a doublé en raison du confinement. Fin mars 2020 on est passé de 13,5% à 26,5%. Puis, après le déconfinement la situation s’est améliorée. Et là, en novembre, le taux a retrouvé celui de mars 2020. La part des dépressifs, elle aussi à doublée. En mars 2020 on est passé de 9,7 à 19,9 %. Et là, de nouveau, avec le second confinement, on constate que 21 % de la population est en état dépressif – soit deux fois plus qu’à la fin de septembre.»
Et Damien Le Gay évoque l’enquête de la fondation Jean Jaurès sur l’idéation suicidaire: « Selon cette étude, 20 % des Français envisagent de se suicider. Et comme le précise l’étude, les «passages à l’acte», en règle générale, viennent plutôt après les crises que pendant. Autre enseignement de l’étude: les «violences conjugales», sur lesquelles le gouvernement et la sphère médiatique ne cessent de communiquer, ne concernent que 1% des français.»
La dépression et les troubles anxieux sont définis par l’OMS et répertoriés dans le DSM 5 (plutôt réservé à la littérature scientifique) et le CIM 11. Sans rentrer dans les détails d’un diagnostic de dépression, je partage cette définition du CPPR, centre Phoenix: trouble mental courant, caractérisé par la tristesse, la perte d’intérêt, de plaisir, sentiments de culpabilité, faible estime de soi, troubles du sommeil, de l’appétit, sensation de fatigue, manque de concentration. Et cette souffrance psychique peut mener au suicide qui n’est pas évoqué dans cette définition. Un épisode dépressif majeur non pris en charge par un professionnel de la santé peut gâcher la vie de nombreuses années (voire dix ans), et mener à une dépression résistante et à des symptômes résiduels. Il faut aussi de pas confondre démoralisation, mal-être avec des troubles anxieux, un épisode dépressif qui nécessite une vraie prise en charge par des professionnels de la santé. Concernant la pandémie, on évoque parfois le Stress post-traumatique.
Une récente enquête de l’OMS confirme que la pandémie impacte les services de santé mentale. Le principal effet constaté est un taux élevé de stress et d’anxiété. De nombreux articles dans la presse mainstream sont sortis sur le sujet, et les lecteurs ont l’embarras du choix. Le site Pubmed comporte au sujet de l’impact sur la psyché de la Covid comporte plus de 1600 références d’articles.
Quelles sont les catégories de personnes concernées par la dépression et l’anxiété voire autres troubles? Nul question de hiérarchiser la souffrance psychologique en fonction du statut professionnel, de l’âge ou des circonstances où elle est apparue. Toute souffrance morale si elle débouche sur un trouble psychique nécessite la même attention en toute équité si le diagnostic est correctement posé par un professionnel de la santé.
D’abord, parlons des soignants qui sont en première ligne de la pandémie. Une revue systématique de la littérature scientifique et une méta-analyse a montré la prévalence de l’anxiété, de troubles de l’humeur et de l’insomnie chez le personnel soignant confronté à la pandémie dont beaucoup ont été confrontés à la mort de leurs collègues et confrères. Les conclusions sans sans appel: L’anxiété a été évaluée dans 12 études, avec une prévalence combinée de 23 · 2% et la dépression dans 10 études, avec un taux de prévalence de 22 · 8%.Enfin, la prévalence de l’insomnie a été estimée à 38,9% dans 5 études. Les femmes présenteraient des taux plus élevés de symptômes effectifs que les hommes et le personnel médical.
Toujours chez les soignants, il est maintenant acquis que le principal impact psychologique à ce jour est le taux plus élevé de stress et d’anxiété et d’épuisement professionnel qui accroit leur vulnérabilité. La réorganisation des services en urgence dans un climat d’incertitude et une « certaine » désorganisation » au niveau de l’attribution des protections (masques, blouses et gants) contribuent à cette prévalence. Beaucoup de soignants ont été comparés à des « combattants sur le front ». Ils ont été exposés directement à une forte charge virale et à un épuisement physique face à l’afflux de patients ainsi qu’à des questions éthiques relatives à des prises de décision qu’ils n’auraient pas souhaité. Interdire les visites ou la présentation du défunt contraire à l’éthique même du choix de leur métier, et créant un sentiment de culpabilité.
La prévalence de la dépression chez les soignants était déjà remarquée hors contexte de la pandémie. Une partie de la littérature scientifique mentionne des conduites suicidaires. Concernant la Covid-19, cinq suicides ont été médiatisés dont deux infirmières en réanimation italiennes et un médecin généraliste français. Difficile pour l’instant de s’en faire une idée quand certains de leurs collègues meurent de la Covid-19.
Si dans les services de réanimation, les soignants sont confrontés plus que dans d’autres services à la mort, la situation est inédite avec le SARS-Cov-2. Les conditions brutales et récurrente des décès les ont profondément ébranlés psychologiquement même pour les plus aguerris.
Il y aurait encore fort à dire sur l’épuisement psychologique et physique des soignants; certains renoncent même à exercer. Exprimons leur toute notre gratitude pour leur engagement professionnel!
Et bien avant l’annonce du second confinement, à la vue de la flambée des contaminations, les grands séniors des EHPAD furent déjà dès début octobre sur le « banc de touche » privés d’activités sociales et visites contingentées. S’il existe des associations chargées de représenter les intérêts des séniors, mention spéciale pour la nouvelle association « Citoyennâge » pour porter la voix des résidents en EHPAD. Le président Philippe Wender (83 ans) ancien cadre informatique, résident d’EHPAD avec son épouse souffrant de la maladie d’Alzheimer: « La société a trop tendance à s’exprimer en notre nom»… »Nous les vieux, on ne nous demande pas notre avis »… »On est dans une société où on veut préserver la sécurité au détriment de la liberté », déplore M. Wender, pour qui « la vieillesse n’est pas un naufrage »… »c’est stigmatisant de fixer une limite » d’âge pour autoriser ou non les gens à circuler à nouveau librement. D’autant que, face au Covid-19, « l’âge n’est pas le seul facteur de fragilité ».
L’ancien militaire, Georges Gerfault, 95 printemps, lui aussi n’est pas en reste: A partir du 11 mai, chaque citoyen français pouvait se retrouver, naviguer, partir dans un périmètre délimité, alors que nous, résidents en maison de retraite, subissions toujours le confinement. C’est à ce moment-là que j’ai ressenti de la révolte…J’ai réalisé qu’une part de mes responsabilités individuelles m’avaient été enlevées car j’étais une personne âgée », a-t-il ajouté, soulignant qu’on ne vit pas les contraintes de la même manière à 20 ans qu’à 95 ans. Les projets, pour nous, c’est maintenant, pas demain.»
Dans un entretien accordé au Figaro, la psychologue clinicienne Marie de Hennezel parle du dilemme éthique de la protection des personnes âgées fragiles avec la difficulté de préserver leurs droits. Pour elle, « cela a été une faute de confiner strictement nos vieux » . Et elle cite le cas d’une personne de 94 ans: « La peur génère des comportements inhumains. On m’a rapporté l’histoire d’une vieille dame de 94 ans qui s’est retrouvée strictement enfermée dans sa chambre avec interdiction d’ouvrir sa fenêtre. Cette consigne avait été donnée par crainte du risque de suicide. Imaginez ne pas pouvoir regarder le ciel, respirez l’air du dehors! Cela m’a scandalisée. Les Ehpad ne sont quand même pas des prisons! Les résidents y sont chez eux. Leur chambre est considérée comme un domicile. J’ai reçu beaucoup de témoignages sur des personnes qui ont cessé de s’alimenter, qui ont perdu leurs facultés cognitives. En voulant les protéger, on leur a parfois nui.»
Et lors du premier confinement, ce bouleversement anthropologique du deuil a chamboulé les familles lors de la perte de l’un de leurs proches en Ehpad que Marie de Hennezel résume en une formule choc: « Ne pas pouvoir dire adieu à un proche, ajourner les rites d’accompagnement et les rites funéraires rend le deuil impossible ». Dans son dernier livre L’Adieu Interdit (que je n’ai pas encore lu) Marie De Hennezel revient sur les conditions inhumaines et inacceptables du confinement strict des personnes âgées. « Je remets en cause la folie hygiéniste qui, sous prétexte de protéger les personnes âgées arrivées dans la dernière trajectoire de leur vie, impose des situations proprement inhumaines.
Et la liste noire des effet psychologiques de la pandémie et des confinements s’allonge avec les commerçants astreints à la fermeture administrative car « vendant des besoins non essentiels ». Une enquête réalisée du 21 au 28 septembre par l’institut Ifop pour la fondation Jean Jaurès révèle que, comme 27% des dirigeants d’entreprise et 27% des chômeurs, 25% des commerçants et artisans ont eu l’intention réelle de se suicider en 2020, notamment depuis la fin du premier confinement. Parmi ces derniers, 42% confient avoir été hospitalisés après une tentative. Il est connu que les crises économiques entrainent des vagues de suicide. Marie Pezé, docteur en psychologie responsable du réseau national de consultations de souffrance au travail, constate « une dégradation générale de la santé » de ses patients avec des tableaux cliniques allant «d’une très grande fatigue à des décompensations psychiatriques en mode délirant».
Les jeunes générations ne sont pas épargnées. Santé Publique France a pointé une « augmentation significative » des troubles dépressifs chez les 18-24 ans. Personne n’est épargné psychologiquement par cette pandémie et le confinement.
Et avec cette recrudescence des épisodes dépressifs, de l’anxiété et des troubles du sommeil, il faudra s’attendre à une hausse conséquente de la prescription de psychotropes. En France, la consommation de benzodiazépines reste élevée. L’impact psychologique de cette pandémie est indéniable: risques accrus de chômage, inquiétudes pour soi et ses proches, confinement et isolement.
Augmentation des traitements type Xanax, Lexomil et Valium tout comme les somnifères. Est-ce étonnant? Faut-il blâmer les médecins prescripteurs des psychotropes? Ce sont souvent les médecins généralistes en première ligne qui recueillent la souffrance psychologique de leurs patients.
On peut noircir des pages et des pages avec la souffrance psychique due à la pandémie et au confinement. En guise de conclusion pour ce post, de la joie et de la gaieté avec ce couple de séniors qui devrait inspirer les jeunes générations qui pensent que les « vieux » sont des personnes fragiles qui n’ont comme perspective que de rester confinés….
Il s’agit d’une expérience à faire en famille ou entre amis à l’aide d’un jeu de rôles s’appuyant sur une métaphore digne d’une fable de Jean de La fontaine.
On entend souvent parler d’intelligence collective pour évoquer les comportements de groupe! Que désigne-t-elle? Elle sert à désigner l’émergence des nouveaux modes de communication, l’accès au savoir et les relations entre individus dans le cyberspace. Pierre Levy pense qu’il faut développer une véritable anthropologie dédiée au milieu virtuel. « Les nouveaux moyens de communication permettent aux groupes humains de mettre en commun leurs imaginations et leurs savoirs»; l’intelligence collective en est le vecteur.
Joseph Henrich, professeur de biologie évolutive humaine, également dans une perspective anthropologique développe dans son livre « L’Intelligence collective, comment expliquer la réussite de l’espèce humaine », la manière dont l’intelligence collective influence notre développement génétique à travers la culture. L’intelligence collective, c’est la culture. Sans elle, l’accès à cette source de savoir accumulée au fil du temps et au fil des générations, nous serions incapables de survivre. Dans son livre, écrit-il: « Ce sont nos cerveaux collectifs à l’oeuvre sur des générations, et non la puissance d’inventions innées ou les facultés créatrices, qui expliquent les technologies sophistiquées de notre espèce et son incroyable succès écologique.» Cela n’exclut pas l’innovation par les cerveaux les plus doués, mais la mise en pratique passe par le groupe qui a mis en commun ses compétences complémentaires. Cela inclut également une interconnexion entre membres ayant chacun un savoir faire. Je vais étayer mes propos en revenant à l’Intelligence Artificielle (IA) et à ses applications dans le domaine médical. Un exemple parmi d’autres. Ainsi « Une approche basée sur le machine-learning (une technologie d’IA explicitement liée au Big Data) assiste les médecins pour diagnostiquer les tumeurs cérébrales. Derrière tous ces programmes qui semblent ne faire qu’un, il y a d’abord l’intelligence humaine (en général). Celle des ingénieurs, des informaticiens et des médecins. C’est un ensemble de compétences scientifiques qui les ont créés. Illustration d’intelligence collective au sens cité précédemment.
Que l’on ne s’y méprenne pas, parler d’intelligence collective ne signifie pas le collectivisme qui renie l’individualité et rogne la liberté par la coercition. La liberté et les respect de l’individualité, celle de la psyché ( le domaine de la psychologie) sont des conditions sine qua none pour que s’exerce l’intelligence collective. Ni la solidarité, mot usité aujourd’hui encore à tort et à travers. L’intelligence collective passe d’abord par le respect de l’intégrité de l’individu humain, le respect de son autonomie au niveau des activités sociales et des ses relations interpersonnelles.
Comment l’intelligence collective pourrait-elle nous aider dans la pandémie actuelle? Le docteur en psychologie cognitive Émile Servan-Schreiber l’évoque dans un récent article du Point. J’ai relevé un passage lumineux où l’intelligence collective pourrait s’avérer judicieuse lors du déconfinement, et Émile Servan-Schreiber propose une une expérience à faire en famille, entre amis ou au bureau! C’est un jeu de rôles s’appuyant sur une métaphore digne d’une fable de Jean de La Fontaine. Elle aurait pu s’intituler le Loup, le berger et ses moutons.
« Chacun reçoit les instructions suivantes : « Vous êtes un berger. Choisissez secrètement autour de vous une personne qui sera votre loup et une autre qui sera votre mouton. Au signal, déplacez-vous afin d’être toujours interposé entre votre loup et votre mouton. » Si chacun s’occupe ainsi de protéger autrui, le groupe deviendra de plus en plus dense jusqu’à faire bloc. Métaphoriquement, c’est la cohésion sociale parfaite. Mais d’autres instructions produisent l’effet inverse : « Vous êtes un mouton. Choisissez secrètement autour de vous une personne qui sera votre loup et une autre qui sera votre berger. Au signal, déplacez-vous afin que votre berger soit toujours interposé entre le loup et vous. » Quand chacun ne cherche ainsi qu’à se protéger, le groupe se disperse en un mouvement chaotique infini. À nous de choisir entre l’intelligence collective d’une société de bergers ou l’aliénation d’un peuple de moutons. »
Alors comment vous définissez vous chers lecteurs? Berger ou mouton? Le loup symbolise le virus, vous vous en doutiez, le berger représente celui qui respecte les gestes barrières, la distance sociale pour préserver les plus vulnérables; celui qui prend soin des autres! Et le mouton…à vous de vous définir…
Un chouette exercice à faire qui aiguise notre sens de la responsabilité envers les autres concernant la contagion virale de la Covid-19. Mieux que la litanie des interdictions diverses délétères pour la psyché qui à force d’être martelées vous enfonce dans la résignation acquise et vous met au trente sixième dessous en annihilant tout espoir ! L’esprit de la métaphore du berger et du mouton est celle du courant humaniste dont le précurseur fut Abraham Maslow, ainsi que du courant positiviste. C’est un exercice ludique de thérapie cognitivo – comportementale.
Alors, osez faire expérience et n’hésitez pas à me faire part de vos commentaires.
« Cette danse des macchabées se déroulait dans les églises le samedi saint, à l’époque où curieusement se célébrait le nouvel an romain. Le peuple étant très religieux, le squelette de la danse macabre ne prêchait pas le néant.»
Le SARS-COV-2, ce diabolique virus est omniprésent dans le monde médical, la recherche, les réseaux sociaux et les médias. Comme l’a écrit le journaliste médico-scientifique Marc Gozlan dans son billet de blog, « Il était une fois les coronavirus »« Depuis le début de l’année, le nombre de publications scientifiques relatives au coronavirus SARS-COV-2 explose. On recense dans la base de données biomédicales PubMed près de 1 800 articles comportant dans leur titre le terme coronavirus, Covid-19 ou SARS-CoV-2.»
La pandémie de cette année n’est pas la seule épidémie virale de l’histoire. Le siècle dernier et le début du troisième millénaire ont connu des pandémies meurtrières comme celle de la « grippe espagnole », due à une souche H1 N1 aurait fait entre 20 et 50 millions de morts. En 2002, le SRAS-Cov, en 2019, nouvelle épidémie de rougeole, entre 2014 et 2016, la fièvre Ebola, de 2008 à 20015, le virus dengue, depuis 2015, le virus Zika, et l’une des plus connues car elle fut politisée dans notre pays avec une préconisation de vaccination, la grippe A (H1N1). Et sans oublier aussi le VIH, depuis 1981 qui a fait 32 millions de morts.
Trois millions de personnes sont infectées par le virus dans le monde. 206.811 sont à ce jour décédées, dont 22.856 en France...le taux de létalité du virus est évalué entre 2 % et 3 %. Par ailleurs, il est rapporté par les professionnels sanitaires que la majorité des victimes du coronavirus COVID-19 étaient âgées (les personnes de plus de 80 ans sont les plus à risque) ou atteintes de pathologies antérieures.
Les caractères inédits du Covid-19 est qu’aucun pays pays n’est épargné, et ce qui l’est encore plus est la mesure prise par des gouvernements de confiner les habitants chez eux entrainant un arrêt quasi-mondial de l’économie. Rester chez soi, ne pas aller au bureau, ne pas aller au spectacle, bref circuler à sa guise, un besoin élémentaire qui figurerait sur la première marche de la pyramide de Maslow s’il l’avait su en son temps, et nous l’avions oublié! La libre circulation aussi indispensable que l’air que nous respirons! Il n’y a pour l’instant aucun traitement ni vaccin pour contrer le virus, et seuls la limitation des contacts sociaux, l’arrêt des transports, des regroupements sont les seuls moyens efficaces avec des mesures hygiéniques, la distanciation sociale pour contenir l’épidémie. That’s life! Il y a aussi un sentiment d’impuissance et d’incompréhension qui nous envahit! Les progrès de la science et de la médecine ont permis un sacré allongement de la durée de vie en pleine forme, l’éradication de certaines maladies avec les médicaments et la vaccination. Symboliquement et inconsciemment nous leur attribuions une fonction presque thaumaturge! La réalité nous rattrape durement! Et bien non, aucune martingale pharmaceutique n’est efficace à ce jour pour empêcher le Covid-19 de prospérer, d’être mortel et de laisser des séquelles invalidantes!
Le Covid-19 évoque le rapport que nous avons avec la mort en Occident. Evidemment, nous savons que nous ne sommes pas immortels comme le héros du film Highlander qui traverse les siècles éternellement jeune tandis que ses proches vieillissent et meurent. Ou bien encore comme l’alchimiste le Comte de Saint-Germain réputé lui aussi « immortel »! Cette épidémie virale nous confronte directement avec les allégories de la Grande Faucheuse et des quatre cavaliers de l’Apocalypse évoqués lors des fléaux de la guerre de cent ans voire l’Argameddon. En psychologie en tout être humain, à tous les niveaux de son existence, coexistent la mort et la vie. L’Éros et le Thanatos. En psychologie, la mort est en psychothérapie souvent symbolique, pour accéder à un état psychologique à un niveau supérieur. En dehors des soins palliatifs, il ne s’agit pas de la mort physique, il s’agit de nos états d’âme! Tout notre environnement extérieur, notre mode de vie que certains appellent consumériste et superficiel nous éloignent de cette fin inéluctable, de la putréfaction des chairs, même si autour de nous, nos proches disparaissent et que nous savons nous aussi, nous les suivrons. Les décès par Covid-19 nous semblent profondément injuste car dans l’inconscient collectif, c’est une mort avant terme! Ô combien ce sont des séniors de plus de 80 ans les plus durement frappés!
Lors d’une une interview, le philosophe André Comte-Sponville, a répondu à une question sur le rapport que nous entretenons aujourd’hui avec la mort, s’il a changé avec le SARS-COVID2, si mourir était devenu inacceptable aujourd’hui « Elle l’a toujours été, répond le philosophe mais comme on y pense de moins en moins, on s’en effraie de plus en plus, lorsqu’elle s’approche. Tout se passe comme si les médias découvraient que nous sommes mortels! Vous parlez d’un scoop! »…« Mais ce n’est pas une raison pour ne parler plus que de ça, comme font nos télévisions depuis un mois, ni pour avoir en permanence « la peur au ventre », comme je l’ai tant entendu répéter ces derniers jours. Un journaliste m’a demandé – je vous jure que c’est vrai – si c’était la fin du monde! Vous vous rendez compte? Nous sommes confrontés à une maladie dont le taux de létalité est de 1 ou 2% (sans doute moins, si on tient compte des cas non diagnostiqués), et les gens vous parlent de fin du monde.»
Mais psychologiquement, comment s’accommodait-on les siècles passées, au temps des grandes épidémies infectieuses où la mort était plus omniprésente dans la vie quotidienne? Le Moyen Age a vu défiler des fléaux mortels comme la peste, le scorbut, le typhus, les dysenteries. Et la mortalité infantile, parlons en! Un nouveau-né sur quatre mourrait dans sa première année, et c’est tout juste si un enfant sur quatre aussi soufflait ses deux bougies, sans oublier les femmes qui mouraient souvent en couches. Certains avancent l’idée d’un déni de la mort actuellement, je penche plutôt que nous avons repoussé mentalement dans le temps, l’échéance fatale due l’allongement de la durée de vie. Et avons sans doute perdu nos racines symboliques et spirituelles; la spiritualité est à voir au sens large et indépendante des religions.
La mort était plus apprivoisée qu’aujourd’hui que les siècles passés? Manifestement, au Moyen Age, elle n’était pas occultée comme aujourd’hui. Comme en témoigne les représentations de la « Danse Macabre « dans les églises au XV siècle. Ce genre de peintures fut très en vogue au XIV et XV ème siècle, celui des grandes épidémies et des grands fléaux qui décimaient des populations entières.
Où se trouvent ces vestiges de la Danse Macabre? L’un d’eux dans l’église de la Chaise-Dieu (Haute-Loire). Vingt-trois personnages, de toutes les catégories sociales y sont représentées dans une posture particulière. Tous, du plus puissant au plus faible, sont logés à la même enseigne. Ils sont en chemin tirés par la mort en tenue de squelette. Chaque personne symbolise un état d’esprit et un statut social. Ainsi deux militaires, en sens contraire de la marche, alors que leur mission première est de mourir pour leur pays. Le juriste est malmené par la Mort qui lui enfonce son chapeaux sur les yeux, lui signifiant ainsi qu’il n’a rien su de la vérité de son vivant.
Hyppolite Fourtout affirme que macabre viendrait de saint Macaire. D’autres pensent que ce mot dérive du poète Macaber. L’archéologue Grasset d’Orcet a une autre interprétation sur ces origines. Elle serait une référence au dieu étrusque de la mort, armé d’un marteau qui en latin se nommait marca, ou marcula.
Cette danse des macchabées se déroulait dans les églises le samedi saint, à l’époque où curieusement se célébrait le nouvel an romain. Le peuple étant très religieux, le squelette de la danse macabre ne prêchait pas le néant. Grasset d’Orcet rajoute son grain de sel local. Dans le Cantal , les Ioniens se nommaient Jas, un peuple de cavaliers. Leur centre politique et religieux était le Mont du Cavalier (Mons Celticus). Étant cavaliers, ils étaient naturellement faucheurs d’où l’origine de l’emblème de la faux ou falco. C’était l’arme du squelette de la danse macabre. Leur déesse était Chloris, déesse des herbages , fille de Teutatès et épouse de Nélée, l’Impitoyable ou la Mort.
Une autre fresque de la « Danse Macabre » se trouve dans la chapelle Kermaria-An-Iskuit (Plouha, Côtes d’Amor); l’iconographie est légèrement différente de celle de la Chaise-Dieu. « Les figures, qui se tiennent par la main, représentent des personnages vivants, de tous âges et de toutes conditions sociales, séparés par des cadavres décharnés qui rythment la farandole. La danse commence au sud (côté chapelle seigneuriale) et se termine sur la face nord. Elle se compose d’une trentaine de personnages de 1,30 mètres de haut, qui apparaissent selon un ordre social décroissant.
L’acteur, l’auteur chargé de rédiger les sentences inscrites sous chaque personnage, mène traditionnellement la sarabande, mais son image a disparu ainsi que celles du pape et de l’empereur. Sont visibles le cardinal, le roi, le patriarche, le connétable, l’archevêque, le chevalier et l’évêque (écuyer, l’abbé, le bailli et l’astrologue, qu’on aurait dû trouver de chaque côté du vitrail, ont également disparu). La danse reprend avec le bourgeois, le chartreux, le sergent. Viennent ensuite quatre personnages qui ne sont pas séparés par des squelettes : le médecin avec sa fiole de médicament et la femme qui s’accroche au bras de ses deux voisins, le mendiant et l’usurier. L’alternance reprend avec l’amoureux en pourpoint, le ménestrel avec son biniou, le laboureur avec sa serpe et son hoyau, et enfin le cordelier (l’image de l’enfant ayant également disparu).»
La danse macabre évoque le rapport ambigu que les hommes entretiennent avec la mort et est lié aux croyances.
Pour égayer ce post mélancolique, et en guise de conclusion, une citation d’Alex Bocat pour mettre du baume au coeur : « Je vous rappelle que la mort ne prend pas de rendez-vous, alors donnez rendez-vous à votre vie.»