L’EXPÉRIENCE DE MORT IMMINENTE: QUE DIT LA SCIENCE? (PARTIE I)

Curieusement, tous les témoignages de N.D.E sont positifs.Les expérienceurs gardent une certaine nostalgie de cette Terra Incognita entrevue. Cette expérience va bouleverser la vie de certains.

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Qui n’a pas lu sur le net ces étranges acronymes de « E.M.I » et de « N.D.E »? Ils signifient respectivement « Expérience de Mort Imminente » avec sa traduction anglaise de « Near Death Expérience. Ce sont des expériences subjectives d’états non ordinaire de conscience que peuvent vivre certaines personnes dans certaines circonstances de l’ordre du trauma si l’on veut un point de comparaison: accident, arrêt cardiaque, noyade, suicide raté, effets secondaires de psychotropes etc. Des « survivants », déclarés cliniquement morts, après un arrêt cardiaque, réanimés, à leur réveil déconcertent leur entourage médical et familial par un étrange récit digne de la série culte « X FILes » qui défie la raison.

L’EMI concernerait les premiers stades de la mort, et leur étude couvre le champ de la psychologie, de la psychiatrie et du monde médical en général; c’est intéressant de les considérer avec pragmatisme, et de voir comment la science traite ce sujet de l’ordre de l’irrationnel car malheureusement les charlatans et marchands du New Age s’en sont emparés, et les N.D.E voisinent avec l’astrologie et autres facéties qui agacent le corps médical.

Les expérienceurs (ceux qui ont vécu une E.M.I) décrivent tous plusieurs impressions: l’impression de quitter leur corps et de l’observer de l’extérieur. C’est la décorporation. D’autres vont voir un tunnel ou se trouver sur  le seuil d’une porte virtuelle, aveuglés et attirés par une lumière blanche, brillante et chaude. Et encore d’autres affirment avoir parlé dans l’Au-delà avec des êtres de lumière ou des disparus. La sensation qui leur  reste de leur voyage « aux portes de la mort » est une sensation de paix, de légèreté, de sérénité qui  perdure et abolit la peur de la mort. Curieusement, tous les  témoignages de N.D.E sont positifs.Les « expérienceurs » gardent une certaine nostalgie pour la Terra Incognita entrevue;  la vie de certains va être chamboulée.

Le chantre des travaux sur les N.D.E est le Dr Raymond Moody, philosophe et psychiatre et auteur du best-seller (publié en 1975) La vie après la vie s’est toujours montré prudent pour aborder ce sujet sulfureux. Selon lui, le phénomène des N.D.E n’est pas rare du tout. Les N.D.E seraient reproductibles à volonté.

Effectivement, il est possible, en l’état  des  connaissances scientifiques « d’injecter » toutes les expériences virtuelles dans le système nerveux central. Dans les années 50, un programme de manipulation mentale de la C.I.A a été consacré à ce genre de recherches avec le L.S.D et autres produits psychoactifs. Et l’implantation de croyances irrationnelles sous forme de « visions » ou de « faux souvenirs » a été amplement démontré. Pour les neuroscientifiques, l’E.M.I résulterait d’un mode de fonctionnement particulier d’une zone du cerveau située dans le lobe temporal droit, le gyrus angulaire, lui même proche de zones impliquées dans la vision, l’ouïe, l’équilibre et le toucher.

En 2001, une étude hollandaise sur les N.D.E, chez les rescapés d’arrêt cardiaque, a été publiée dans la prestigieuse revue anglaise “The Lancet”. Menée par le Dr P.Van Lommel, elle porte sur 344 patients, qui après un arrêt cardiaque, ont été ranimés dans 10 hôpitaux hollandais. Les résultats de cette étude montrent que l’E.M.I n’est pas une  constante. Seuls 18% des patients interrogés disent avoir vécu une N.D.E,  parmi lesquels 12% relatent une « expérience profonde ». Si l’on s’en tenait à une explication purement physiologique, telle qu’une anoxie cérébrale, la plupart des patients déclarés cliniquement morts devraient avoir vécu une N.D.E. Ce n’est pas le cas!

L’étude de Van Lommel apporte du poids à l’hypothèse survivaliste, c’est à dire que la conscience survit à la mort du corps. Cette conception a été critiquée par Jason J.Braitwaite, non pas sur les données récoltées mais sur ces conclusions survivalistes. J.Braitwaite est un neuropsychologue spécialisé dans l’étude des facteurs neurocognitifs sous-jacents aux troubles de la conscience (hallucinations, perceptions aberrantes et distorsions perceptives). L’étude de Lommel ne fournit pas la preuve que l’esprit et le cerveau sont séparés du cerveau. Ses conclusions relèvent du domaines des croyances et de la foi. Toutefois, il faut retenir que la méthodologie de la collecte des données est acceptable.

Encore des expériences connues sur les E.M.I. Celles du neuroscientifique Michael Persinger en 1995. Il a stimulé artificiellement plusieurs aires du lobe temporal pour déclencher des phénomènes comparables aux EMI. Il n’a pas réussi à réaliser une EMI complète décrite par les « expérienceurs », mais il a réussi au moins à déclencher chez les sujets des visions mystiques et des sensations de décorporation. Même s’il semble que ce qui suit s’éloigne des des E.M.I, il faut évoquer l’approche rock’an roll de M.Persinger avec ses études sur l’expérience religieuse et la sensation d’une présence invisible dans la pièce.

Des chercheurs suédois ont voulu réitérer l’expérience de Michael Persinger sur les visions mystiques, mais échec et mat. Leur conclusion fut que l’expérience était corrélée à la personnalité et à la suggestibilité des sujets. Ce en quoi, Michael Persinger, dans le International Journal of neuroscience, argue que les chercheurs suédois s’étaient plantés dans leur programme informatique et avaient négligé la configuration magnétique qui induisait la présence éthérée dans la pièce; il réfute ainsi la notion de suggestibilité. On peut également s’étonner qu’un neuroscientifique comme Michael Persinger ait publié un rapport sur la communication télépathique avec le médium Sean Harribance. Ce dernier prône sur son site la thérapie par champ biologique traitant le cancer par des moyens non invasifs. Alors, s’il semble que les propos de Michael Persinger soient séduisants sur les états non ordinaires de conscience, le scepticisme reste de rigueur.

Avec l’étude Aware, Le Dr Sam Parnia, directeur de recherche sur la réanimation en soins intensifs à l’université de médecine de New-York a voulu aller plus loin que la collecte de témoignages de N.D.E; terme qu’il semble réfuter. Avec son équipe composée de 17 chercheurs venus de tous les États-Unis et du Royaume-Uni, Sam Parnia a voulu comprendre, tout d’abord, ce qu’était « l’expérience mentale et cognitive de la mort », étudier ce qui se passait dans la tête de quelqu’un qui a eu  à un arrêt cardiaque, et dont le coeur est reparti.

39 pour cent des interrogés pour cette étude affirmaient se souvenir de quelque chose alors qu’ils étaient cliniquement morts. Au final, si cette étude, la plus vaste à ce jour sur le sujet, « ne permet pas de conclure à la réalité ou à la signification des expériences d’E.M.I rapportées par certains patients, en raison de la trop faible incidence du phénomène de souvenirs visuels (2%), elle ne permet pas non plus de les désavouer  et requiert de poursuivre les études dans ce domaine » indique Sam Parnia [

Selon les auteurs de l’étude, sept grands thèmes reviennent le plus fréquemment dans les témoignages:
-Sentiment de peur-
-Visions d’animaux ou de plantes-
-Une lumière vive-
-Violence et persécution-
-Impression de déjà-vu-
-Vision d’un proche –
-Souvenir des évènements qui ont suivi l’arrêt cardiaque-

Les gens vivent une véritable expérience cognitive au moment de la mort, parler de souvenirs proprement dits seraient hasardeux.  Ils étaient, pour la plupart, sous sédatifs et Sam Parnia pose l’hypothèse que leur inconscient a enregistré une expérience particulière. Sam Parnia note que l’on peut trouver chez certaines personnes des symptômes faisant penser à un Stress-Post-Traumatique.

La suite à venir des rapports entre les E.M.I et la science dans une deuxième partie.

ÉCOPSYCHOLOGIE, UNE NOUVELLE DISCIPLINE POUR REMÉDIER À L’ÉCO ANXIÉTÉ? VRAIMENT?

Ce si sympathique néologisme d’écopsychologie est un piège abscons, et avant-tout un concept marketing.

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L’écologie évoque  la science du climat mais aussi s’intéresse à la santé mentale! Et bien oui, les souffrances de la psyché pourraient aussi se mettre au vert avec l’écopsychologie. Soigner la terre, guérir l’esprit, serait l’un de ses fondements!

Le synonyme d’écopsychologie serait (selon certains sites web) la psychologie environnementale, une discipline à part entière qui  est « l’étude des interrelations entre l’individu et son environnement physique et social, dans ses dimensions spatiales et temporelles ». L’excellent livre de Gabriel Moser, Psychologie Environnementale qui est représentatif du sérieux de la discipline de psychologie environnementale sans connotation idéologique. Cet «ouvrage vise à la compréhension des rapports entre l’individu, la société et l’environnement, d’une part, et la mise à disposition de savoir-faire et d’outils d’intervention au niveau de l’habitat, du lieu de travail, de la ville, de l’environnement global dans le cadre du développement durable, d’autre part. » Même si l’approche ne répond pas aux critères de « l’Evidence Based Science », la psychologie environnementale peut s’avérer une source de réflexion pertinente.

Aujourd’hui, en dehors des programmes politiques qui ne sont pas l’objet de ce blog, il y a une recrudescence du préfixe « éco » accolé à des mots basiques aux fins de donner une connotation écologique ou environnementale. Certains ont un véritable sens et peuvent être acceptables. L’un d’eux est celui de l’éco-anxiété dont les conséquences sont répertoriées dans des articles répertoriés dans Pubmed.

Qu’est ce que l’éco-anxiété? Ce terme a été créeé en 1997 par la Belgo Canadienne Véronique Lapaige, médecin chercheuse en santé publique et santé mentale. Elle a pris soin de préciser qu’il ne s’agissait pas d’une nouvelle pathologie mentale, mais selon elle cette forme d’anxiété repose sur l’adhésion à la thèse du réchauffement climatique à laquelle elle est sensible.

L’éco-anxiété est une anxiété chronique face aux bouleversements environnementaux. Selon le dictionnaire Oxford, c’est une inquiétude extrême face aux dommages actuels et futurs causés à l’environnement par l’activité humaine et le changement climatique. Ce mal toucherait les jeunes générations. Des jeunes adultes de 18 à 34 ans. Le portrait-robot (non validé scientifiquement) serait celui d’une femme habitant en ville, diplômée et de moins de 45 ans.

Il n’y a pas de consensus notamment médical sur cette supposée nouvelle forme d’anxiété qui ne figure pas dans le DSM V. Ce n’est ni un syndrome ni un diagnostic psychiatrique. Notons que l’American Pyschological Association a bien défini l’éco-anxiété comme la peur chronique d’une catastrophe environnementale (a chronic fear of environnemental doom).

On trouve dans la base de données Pubmed des articles sur l’éco-anxiété qui peut amener quelqu’un en psychothérapie car elle est source de détresse et altère la vie quotidienne. Il s’en trouve un sur le changement climatique (que personne ne nie) et qui induirait différents types de « syndromes psychoterratiques » émergents tels que l’éco-anxiété mais aussi l’éco-culpabilité et l’éco-chagrin, outre la détresse qu’ils peuvent causer facilitent un comportement respectueux envers l’environnement. J’ai du mal à croire à une méthodologie rigoureuse concernant ces syndromes terratiques.

Si l’éco-anxiété n’est pas un trouble mental, il n’en reste pas moins qu’elle se manifeste par un certain nombre de symptômes. Selon les psychiatre Antoine Pelissolo et Célie Massini, « les personnes qui déclarent souffrir d’éco-anxiété rapportent des symptômes du champ des troubles anxieux : attaques de panique, angoisse, insomnies, pensées obsessionnelles, troubles alimentaires (anorexie, hyperphagie), émotions négatives (peur, tristesse, impuissance, désespoir, frustration, colère, paralysie). Ces symptômes sont à l’origine d’une perturbation notable de la vie quotidienne chez certains individus et les consultations pour ce motif seraient de plus en plus nombreuses, notamment aux États-Unis16 ».

Mais revenons au terme d’écopsychologie, qui à mon sens est sujet à des interprétations et à des dérives. L’écopyschologie est manifestement une discipline inédite  qui s’est développé outre Atlantique depuis les années 1990. Elle a séduit des psychologues de la région de San Francisco où une formation est dispensée à l’université de Santa Barbara! Durant cette décennie, la presse française a encensé pendant plusieurs semaines cette nouvelle discipline du développement durable à la rubrique Santé ou Bien-Être. On est en droit de se demander si l’écopsychologie est un nouvel OPNI (Objet Psychique Non Identifié en relation avec la santé),  l’écopsychologie ne figure pas dans Medline/Pubmed qui référence les études scientifiques. Face à cette lacune des cautions scientifiques, le scepticisme s’impose. Tout en reconnaissant que sur Pubmed, il se trouve parfois des articles surprenants dans leur méthodologie scientifique.

L’écopsychologie n’est pas une nouvelle discipline. C’est Theodor Roszak, sociologue et auteur de science-fiction, qui popularisa en 1995 le terme d’écopsychologie. Il se serait inspiré des travaux de Gregory Bateson, l’instigateur du courant systémique et l’un des piliers de l’école de Palo Alto. Gregory Bateson avait évoqué, en son temps, l’écologie de l’esprit où « les progrès en sciences proviennent toujours d’une combinaison de pensées décousues et de pensées rigoureuses. » Cette alliance permettant de faire progresser la science en fonction des besoins des sociétés.

En écologie, le pragmatisme de la science est nécessaire. Depuis les années soixante, on assiste à une crise de la science au profit de l’inflation du pseudo-scientisme. L’écologie en découd souvent (sauf exception) avec l’esprit scientifique en général, et c’est souvent l’auberge espagnole. Lorsque l’écologie parle de santé publique, la prudence est de rigueur pour ne pas jeter les gens entre les mains de charlatans sous le prétexte que la terre perd la boule, et que par effet domino, les terriens aussi.

Théodor Roszak est perçu comme un visionnaire critique de la science, mais ce n’est pas l’avis de tous. Pour le philosophe australien John Passmore, sa notoriété aurait provoqué une méconnaissance de la nature de la science, en la diabolisant car le sociologue n’a parlé que de ses dégâts, de la déshumanisation qui a créé un monde aseptisé. Afin de sauver l’humanité des désastres de la science, Théodor Roszack pense qu’il est urgent de réinstaurer l’imaginaire et la créativité. En 1969, le sociologue avait vulgarisé le néologisme de contreculture, et sa vision du monde est holistique. Terme dévoyé par le New Age avec le mythe de Gaia qui draine beaucoup d’émules de l’écologie fâchés avec la science.

L’écopsychologie étudie l’action de l’environnement sur la psychologie, et l’effet de la nature sur l’équilibre des êtres humains. C’est un sophisme de dire qu’il y a des interactions entre la santé et l’environnement. La dégradation des écosystèmes, la mutation des biotopes, et les pollutions diverses ont ou auront si on n’y prend garde une action néfaste sur la santé de milliard d’individus.
Ainsi, les pesticides seraient incriminés dans de nombreuses maladies et on les soupçonne avec diverses pollutions d’être à l’origine de nombreuses maladies et de cancers. Du côté de la santé mentale, on étudie l’influence de l’environnement architectural sur l’équilibre psychologique. Des projets architecturaux sont élaborés pour favoriser les performances, renouer avec la convivialité. On construit des résidences adaptées aux personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer.

Des études anglo-saxonnes montrent les bienfaits de promenades dans des espaces verts pour les enfants hyperactifs et les personnes souffrant de dépression, permettant ainsi d’alléger la prescription de psychotropes. D’après l’étude de Jessica Finlay, « passer chaque jour un moment dans la nature améliorerait la qualité de vie, la santé morale et physique des personnes âgées». Ces interactions entre la santé mentale et l’environnement correspondent à l’esprit écologique mis en exergue par Gregory Bateson, sans être légitimées en tant qu’actes relevant de l’écopsychologie. Un peu de bon sens!

La lecture de sites autoproclamés, de cette nouvelle chapelle du développement durable a de quoi laisser rêveur. On apprend ainsi qu’on peut-être éco-anxieux (l’éco-anxiété étant liée aux comportements des autres), et que pour se soigner, on peut consulter un écothérapeute qui pratique une écothérapie individuelle ou de groupe. Probablement, rémunéré avec des éco-honoraires à l’éco-acte!

C’est déjà tout un poème d’être consensuel autour d’un diagnostic en psychopathologie, s’il faut encore faire rentrer dans la danse de nouvelles maladies mentales écologiques, on n’est pas sorti de l’auberge! Avec de l’imagination, on peut décliner toute la nosographie des troubles psychiques du DSM V ou du CIM 10. Le jeu consiste simplement à accoler devant le préfixe éco. On peut imaginer l’éco-névrose, l’éco-dépression, l’éco-schizophrénie, l’éco-addiction à des éco-drogues et la liste des nouvelles maladies mentales n’est pas exhaustive. Certains chantres de l’écopsychologie sont manifestement les héritiers directs du New Age. Ces éco-gourous définissent l’écopsychologie comme de la psychologie spirituelle qui vous éveille à la spiritualité en triturant vos chakras, votre kundalini et le reste de votre anatomie occulte, pour vous faire accéder aux paradis verts de l’ère du Verseau.

Ce si sympathique néologisme d’écopsychologie est un piège abscons, et avant-tout un concept marketing. L’un des dangers est que cette discipline pseudoscientifique soit confondue avec l’éco-santé validée par l’OMS (Organisation mondiale de la santé), où les interactions entre la santé et l’environnement font l’objet d’une véritable démarche scientifique. Je préfère nettement le concept de psychologie environnementale. L’absence de rigueur scientifique risque de nuire gravement à la bonne santé de l’écologie en confortant les propos du très sceptique Freeman Dyson (1) qui y voit « une nouvelle religion séculière mondiale.» Judith Curry, climatologue au CV scientifique prestigieux fait aussi partie de ces sceptiques.

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